les cris le réveillent. il se terre sous la couette. se roule en boule pour essayer d’oublier l’étau qui enserre sa gorge. il sait que cameron est réveillé. cameron a l’air toujours réveillé. comme un super-héros qui veille sur eux. peut-être qu’il l’ignore, mais asher sait le regard protecteur qu’il  pose toujours sur lui et kent. il le sait parce qu’il a l’impression que rien ne pourra jamais lui arriver alors. parfois il aimerait se glisser dans le lit de son grand frère. mais ce n’est plus un bébé. plus depuis qu’il a compris d’où venaient les bleus. d’où venaient les larmes. ce n’est plus un bébé depuis qu’il a compris qu’il pouvait haïr quelqu’un plus fort qu’il ne pourra jamais aimer personne. il a peur pour maman. peur qu’un jour, papa ne puisse plus s’arrêter et qu’il arrive un malheur. chaque nuit, les mêmes cauchemars le taraudent. mais on n’en parle pas dans cette maison. on ignore tous le drame qui s’abat continuellement sur la famille Jones. alors dans la solitude de sa chambre, il prie parfois pour que tout s’arrête. peu importe comme ça s’arrête.

et tout s’arrête un jour. brusquement. facilement. les larmes coulent à flot, noient le spectacle macabre. finalement il n’est pas si grand. il n’est qu’un petit garçon. qui veut oublier ce qu’il voit. alors un hurlement déchire sa gorge. il y a tellement de sang. on ne dirait pas ça dans les films. il recule précipitamment. trébuche. se relève. part se réfugier sa chambre, les genoux repliés sur sa poitrine. ça ne devait pas se passer comme ça. maman l’avait dit. c’était fini. il avait préparé ses valises. le cauchemar devait se terminer. ils allaient partir. alors quelqu’un entre dans la pièce et il ouvre brusquement les yeux, s’attendant presque à sentir la poigne de son géniteur. mais ce n’est pas possible. non. les morts n’ont pas de poigne. cameron. il tremble de tous ses membres. il voudrait que son frère le serre dans ses bras mais ce dernier crie son nom. lui somme de partir. c’est comme un électrochoc. il attrape ses sacs, obéit docilement.  il se tourne alors vers cameron. il voudrait mettre des mots sur ce qu’il ressent, lui dire qu’il… mais le regard de son aîné est froid, tranchant. il ne l’a jamais vu ainsi. à la fois si calme et en colère. c’est peut-être le pire de cette situation finalement. effrayé, asher se détourne, ravale ses sanglots et quitte le foyer.

asher découvre alors que la vie peut être douce. pour la première fois, il ne songe pas à l’échéance. au moment où tout basculerait définitivement. ce moment est déjà arrivé, en fait. et c’est avec une certaine culpabilité qu’il admet que ce n’est pas plus mal. rien que le sourire de maman vaut tous les malheurs du monde. même s’il déteste son nouvel ami. il ne veut pas d’un autre homme dans leur vie. le dernier a fait suffisamment de mal. maman a déjà assez avec ses trois fils pour la protéger. pas besoin d’un intrus. mais il ne fait rien. parce que sa mère a le visage qui s’éclaire d’une étrange façon quand elle le regarde. il se promet juste que si jamais quelque chose arrive, cette fois-ci, il n’attendrait pas une seconde. parfois, la violence qu’il ressent l’effraie. il a l’impression qu’il pourrait tuer pour sa famille. sans même une once d’hésitation. il se rappelle trop bien du bonheur qu’il a ressenti à foutre une raclée à cet imbécile qui a insulté sa mère. il n’en a parlé à personne. pas même à cam, à qui il a l’habitude de tout dire. il en a honte, de cette rage qui grandit chaque jour en lui. elle lui fait bien trop penser à quelqu’un en particulier.

alors asher passe beaucoup de temps avec son petit frère. kent. l’innocence qu’il voit briller dans ses yeux le rassure. si kent a pu s’en sortir indemne, alors lui aussi pourrait guérir. car il continue de se réveiller en sursaut, la respiration coupée. quand une tasse s’écrase sur le sol, son corps entier se raidit, dans l’attente de la violence. chaque cri, chaque geste brusque fait rater un battement à son coeur. mais ce n’est rien que temporaire. pine creek est propice à la guérison. il le sait.


vrac
1. à l'âge de onze ans, Asher s'installe à Pine Creek où il trouve rapidement un attachement à la tranquillité de la petite ville, toujours en quête de rires et de divertissements pour rattraper le temps perdu.
2. adolescent agité, il a souvent causé des soucis à sa mère, qui a été convoquée à plusieurs reprises par le conseiller principal pour discuter de son comportement. il n’a jamais été un très bon élève, n’a jamais été voué à de grandes études. Cependant, il s’est senti obligé de décrocher son diplôme et quand il a vu les yeux de sa famille briller de fierté, il n’a pas regretté une seconde.
3. asher a eu de nombreuses histoires d'amour, mais n'a jamais été enclin à la stabilité, préférant flirter et profiter de l'instant présent. il ne cherche pas vraiment à mentir ou à tromper, il se laisse simplement porter et prend - souvent - les mauvaises décisions. il ne veut pas blesser mais finit souvent par le faire. il n’a jamais vraiment eu de retour de bâton d’ailleurs. sauf une fois. une histoire idiote. il a rencontré cette fille il y a deux ans. fanny. elle lui plaisait vraiment. mais il y avait aussi cette autre fille avec qui il était engagé, plus ou moins officiellement. sans savoir vraiment comment, il a commencé à sortir avec les deux. après tout, pourquoi choisir ? il n’allait se marier ni avec l’une, ni avec l’autre. bien sûr, il a fini par se faire démasquer. obligé de faire un choix, il a décidé de quitter fanny. sa petite-amie lui a pardonné facilement. s’il y a bien une chose qu’il déteste, ce sont les complications. alors pourquoi s'ennuyer en choisissant un chemin plus tortueux ? quelques semaines plus tard, attaché à sa liberté, il a fini par la quitter également. enfin, c’est ce qu’il pensait. mais fanny hantait ses pensées. le voilà le retour de bâton. et quel bâton ! plus ou moins dans le déni un moment, aujourd’hui, il est déterminé à la récupérer. au moins pour aller jusqu’au bout de ce sentiment inconnu qui creuse son estomac dès qu’il pense à elle.
4. il est un habitué des sorties nocturnes, fuyant la solitude et le silence de son appartement, cherchant la compagnie et l'animation pour se sentir réellement vivant.
5. malgré les tumultes de sa vie personnelle, asher est dévoué à son travail, reconnaissant envers son oncle pour lui avoir offert cette opportunité, et il fait preuve de sérieux et d'engagement dans ses responsabilités professionnelles.