let me down slowly
il est parti. comme tous les autres. mais il a été le premier. rendez-vous dans quinze ans qu'une des leurs avait dit. bande d'idiots. promesse lancée probablement trop alcoolisée.  personne n'y croyait vraiment au fond. pourtant ils ont tous répondu présents. à cause de la fougue de la jeunesse, de cette impression d'éternité quand l'aube des vingt ans les a tous touchés. quelle naïveté presque touchante. seulement, tous ont fini par partir. lui en premier. les contacts se sont étiolés, voire coupés. le passé a été relégué dans sa chronologie. les photos ont commencé à se racornir. ils ne sont à présent que ces fantômes sur ces clichés, des silhouettes fantomatiques qu'il croit apercevoir parfois au coin d'une rue. vague égarement d'une réminiscence douloureuse le temps d'un instant. il n'y a plus eu qu'eux deux à la fin. elena. elle était belle elena - même lui le reconnaissait aisément. jeune femme qui savait envoûter d'un regard toute la gente masculine. une enchanteresse aux doigts de fée qui pourtant avait vu son prince charmant se faire la malle. ils étaient seuls. c'est peut-être ça qui a fini par les rapprocher complètement. solitude partagée qui ont rapproché leur coeur un instant. c'est ce soir-là que tout commença. c'était facile avec elle. ils se connaissaient si bien. aucun reproche ne vient ternir le sourire qu'elle lui adressa - celui où il aperçut pourtant la même douleur. elle sauta dans le vide avec lui. cette nuit-là, seule la lune devint leur confidente. ils se découvrirent cœurs cassés. des myocardes en perdition qui semblaient retrouver du réconfort le temps d'un instant. un moment de répit dans cette tourmente permanente. ce fut d'abord qu'une nuit. une seule et unique chance. et puis des autres jours, et des autres nuits. deux cœurs réunis pour tenter de panser les blessures de l'autre. une tentative désespérée de réparer l'âme. pour retrouver quelques instants de plénitude sans que les problèmes ne les hantent. l'anesthésie est si bonne. l'illusion bien trop captivante.

all my tears on another love
le mensonge était si bon. douce chimère que le coeur apaise le temps d'un instant. la passion n'était pas dévorante. les sentiments se faisaient tendres, sécurisants. aucun des deux ne prononça les mots. les étiquettes semblaient s'envoler. ça l'arrangeait. il tenait son propre rôle à la perfection. le masque qu'il avait porté depuis des années semblait presque être une seconde peau. son personnage finissait par le convaincre lui-même. c'était simple, c'était facile. c'était lâche. l'amour était tout autre. il prenait une forme tendre, une forme bancale. peut être que leurs cœurs meurtris se satisfaisaient de cette affection à demi. c'était déjà bien mieux que la solitude. et puis il y a eu ce test. quelques semaines après. deux traits positifs qui ont fait basculer leur univers. ils n'avaient plus le choix. c'est ce qu'elle lui dit en tout cas. t'es le père. damn it. destins qui se lient à jamais à travers ce petit être. qu'ils le veuille ou non. ils sont voués l'un à l'autre. leurs familles les pressent encore plus. ils sont pourtant si jeunes, encore des adultes enfants que la vie a pourtant déjà bien abîmés. mais le choix est déjà pris depuis bien longtemps. les noces finissent par être célébrées.

till forever falls apart
les années passent. l'enfant grandit. la routine s'installe. le couple s'engraine dans une sorte de roue qui ne s'arrête jamais. leur vie semble parfaite. accordée à la perfection. l'adolescence reste un pont à passer. l'enfant devient un sale gosse. l'âge ingrat dit-on. des rebellions qui lui rappellent celles qu'il avait pu avoir. ça le fait sourire. le dialogue est parfois difficile entre les générations. mais l'affection parentale finit toujours par adoucir les mœurs. la famille vit dans un quartier calme, presque trop propre. rien ne dépasse. tout est beaucoup trop cadré. elena est toujours à ses côtés. petit rituel qui s'est installés entre eux. l'affection s'est mêlée au respect avec le temps. un peu d'amour sans doute. comment serait sa vie sans elle ? une dépendance inconsciente à cette vie qu'ils ont construite ensemble. et puis, elle est belle elena. aussi belle qu'à l'époque. quelque part il se retrouve un peu le temps d'un instant quand elle est dans ses bras. il retrouve cet idiot d'étudiant qu'il avait pu être, à se donner des airs pour charmer le monde. elle rit à ses blagues stupides d'un rire sincère. il aime son rire. et toutes les petites choses qui font d'elle ce qu'elle est. il se convint que c'est ça l'amour. et sans doute qu'elle s'y retrouve elle aussi. la petite étudiante qui savait envouter quiconque. une seule parole et le monde s'arrêtait pour elle. pourtant, tout a changé. leur bande n'est qu'une vieillerie qui prend la poussière sur l'étagère d'un antiquaire. il y repense souvent. à ces drôles de lurons qu'ils avaient tous été. que sont-ils devenus ? la promesse reste dans un coin de son myocarde. même si celle-ci s'est brisée il y a bien longtemps. aucun autre ne sera au rendez-vous. tous vivent leur vie probablement à l'autre bout de la planète. nostalgie d'une époque où tout semblait si simple dans sa tête. où sa seule préoccupation était la fondation d'un groupe de musique avec l'un de ses potes. rêve illusoire d'un gamin bien trop rêveur. mais l'époque bénie est un chapitre terminé depuis bien des lustres. et qui voudrait dormir avec des fantômes ?